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Qui vivra, rira ! [ par Tibou Kamara

Chaque jour qui passe réserve son lot de surprises et de rebondissements avec la nature humaine. Comme les saisons se succèdent, inlassablement, les mutations dans notre société s’enchaînent et s’enchevêtrent dans une comédie et une parodie qui oscillent entre caricature et satire sociale.
La Guinée vit une fresque de son histoire, dans un tourbillon riche d’enseignements pour aujourd’hui et demain. Chacun a compris que les hommes sont très versatiles et qu’il ne faut jamais se fier à leurs opinions ni croire que leurs choix sont définitifs. Ceux qui se plaisaient à condamner les autres de servir un régime et de soutenir un homme qui est à la tête du pays, parce qu’eux auraient des convictions et seraient attachés à des valeurs, rivalisent d’ardeur et de zèle pour afficher leur appartenance au pouvoir établi, leur dévouement au Prince.
Comme pour dire : « Faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais » ! Selon que je sois invité autour de la table ou languisse d’attendre mon tour, je vois le monde en rose ou m’illustre dans les offenses et les outrages. Et, comme la roue tourne, le discours continuera de vaciller au risque de prendre des rides et de briser des rêves intimes, longtemps ignorés de tous et considérés comme impossibles à réaliser en temps normal et dans les conditions habituelles. Si l’histoire est écrite par les vainqueurs, elle se fait avec les héros de l’heure, donc ne peut s’encombrer souvent des scrupules du passé ni disposer, à certains moments, de la lucidité d’entrevoir les pièges du présent et les complications de l’avenir. On prend les mêmes et on recommence : « Tout change pour que rien ne change », voilà le cycle sans fin d’une symphonie jamais achevée qu’il nous est donné de revivre chaque fois dans la monotonie du temps et le bégaiement d’une histoire paresseuse.
On découvre ce qu’on savait déjà, que la pudeur ne permet pas de reconnaître ni d’admettre encore, que la vertu rejette ou néglige à bon escient : tous les hommes – quasiment – sont mûs par leurs intérêts et chacun espère se vendre au prix qu’il mérite et qu’il fixe aussi. « On m’achète, mais je ne me vends pas », pourrait dire chacun comme Mirabeau, pour se défendre d’avoir été acheté par la cour des Tuileries. Mais qui se vend ? Qui achète aussi qui ?
À présent que les choses sont plus claires et que nous avons une meilleure compréhension des variations possibles chez chacun, il apparait que nul n’est immunisé contre les trahisons. Cela rend la vie plus simple pour tous, et le débat pourra ainsi se dérouler sans passion, surtout avec moins de forfanterie et de duperie.
Tant qu’on vivra, on souffrira des changements que la nature impose, que les hommes portent dans leurs gènes et qu’ils cherchent toujours à exploiter ou retourner à leur avantage, en alliant « adaptabilité » au contexte et « compatibilité » avec le régent.
Qui osera jeter la première pierre dans cet univers kafkaïen où l’instinct de survie est devenu le maître de chacun ?
Par Tibou Kamara, journaliste et ancien ministre 

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