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Commémoration du 18 octobre 1971 : Témoignage d’un enfant né et grandi à Boiro

Cette année, les témoignages sur le vécu de l’enfant métis né et grandi entre les prisonniers et les tortionnaires du camp Boiro ont été au cœur de la cérémonie de commémoration des fusillades du 18 octobre 1971 rehaussée de la présence du président Mamady Doumbouya et du Premier ministre de la Transition Mohamed Béavogui. Une première depuis la fin du régime Sékou Touré en 1984. Le Populaire vous propose le témoignage phare livré ce jour-là par Daniel Philippe de Sainte Marie, né et grandi entre prisonniers et tortionnaires du camp Boiro.

Fils d’une guinéenne du Fouta Djalon et d’un français bon teint, Daniel Philippe de Sainte Marie a vu le jour, et passé son enfant à l’intérieur du camp Boiro sous Sékou Touré. Il est membre de l’Association des victimes du camp Boiro (AVCB), que Daniel Philippe de Sainte Marie. «Ma maman était hôtesse de l’air» au moment des faits. Elle a été «arrêtée au marché Niger» où elle était entrain de faire ses courses. «Elle a été amenée au camp Boiro, c’était dans les années 1971. Je pense que cette arrestation brusque de ma mère était probablement liée à mon père qui était un blanc, parce que je sais qu’elle ne faisait pas de politique. Elle s’est retrouvée en prison comme ça, sans jugement, sans raison fondamentale. Nous, victimes du camp Boiro, ce que nous continuons à réclamer, c’est très simple, on le dit tout le temps : c’est la justice, la reconnaissance et la réhabilitation des personnes victimes du régime de feu Sékou Touré. Parce que, beaucoup de gens ont été tués, emprisonnés et accusés à tort et on les a étiquetés comme les ennemis de la République alors que ce n’était pas vrai. Des gens ont été ostracisés, on les a mis à l’écart. On les a traités comme des ennemis alors que ce n’était pas vrai. Donc, le seul but qu’on recherche, c’est la réhabilitation, la préservation de la mémoire collective et la vérité ».

Etre né en prison …

«Qu’est-ce que ça peut faire d’être né en prison ? Ça fait toujours mal, ça perturbe la vie d’un être humain. Quand vous vous retrouvez né entre quatre murs, ça perturbe toute votre vie. Vous n’avez pas la même perception que les autres. Moi, je n’ai pas joué avec les autres enfants (de mon âge), j’étais là-bas jusqu’à l’âge de six ans, j’étais qu’avec des adultes. C’est là-bas que j’ai appris à lire et à écrire. Donc, c’est un peu resté dans mon esprit. Jusqu’à présent, je vis un peu renfermé sur moi-même parce que j’ai grandi comme ça avec des grands ».

Fusillades et pendaisons

Les nuits du 31 juillet et du 18 octobre 1971 ont été celles des exécutions de militaires et de civils sous le régime Sékou Touré.

Avant cela, le 25 janvier de la même année furent exécutés par fusillade et pendaison à travers tout le pays, les accusés d’être impliqués dans l’agression portugaise de 1970. Ces «nuits du 31 juillet et du 18 octobre 1971 resteront gravées aussi dans nos mémoires par l’ampleur et la cruauté des exécutions»,  a déclaré lundi, 18 octobre 2021,  le secrétaire exécutif  de l’Association des victimes du camp Boiro (AVCB), M.Abdoulaye Conté devant une foule nombreuse et de hautes personnalités de l’Etat.

« Mon colonel, nous remercions Dieu qui seul a permis votre avènement à la tête de la Guinée. Vos premières décisions en faveur des Droits humains sont salutaires. Et ainsi, le plus grand acte symbolique à poser pour apaiser des milliers de familles victimes des crimes d’État était de se recueillir au camp Boiro», a-t-il déclaré en adressant ce message particulier au président de la Transition, le colonel Doumbouya.

Le secrétaire exécutif de l’AVCB a ensuite exprimé les demandes de «restitution par un acte officiel à l’AVCB de la partie carcérale du Camp Boiro que le général Lansana Conté avait déjà restituée en 1993, mais dont l’accès a été interdit depuis 2020 ; la réhabilitation des victimes des différents camps de torture ; ce qui signifie notamment, mais non exclusivement, l’annulation solennelle des jugements de condamnation à l’encontre des personnes concernées, et le rétablissement de la vérité sur les conditions d’obtention des aveux, et d’exécution des détenus ;  la déclassification des archives officielles de l’Etat concernant les camps de torture et la restitution des biens saisis par le régime de Sékou Touré, et non encore restitués aux victimes aux termes de l’arrêté de restitution édicté par le CMRN » (ndlr, Comité militaire de redressement national).

Par Léon Kolié

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