L’ancien Président de la FEANF, ancien opposant est désormais, pas, comme une légende qui veut falsifier l’histoire, le premier Président démocratiquement élu, mais bel et bien le premier Président Guinéen déchu et humilié de son vivant. Le souhait est qu’il en soit le dernier.
Lors d’une interview à un média international, le Président Alpha Condé, sur une question relative à un risque de renversement de son régime, s’était montré très confiant et catégorique : » L’armée Guinéenne est Républicaine, c’est quand le Chef de L’État meurt qu’elle prends le pouvoir… » .
Au-delà de la contradiction sinon de l’ambiguïté qui s’attache à cette réponse qui veut qu’une Armée soit à la fois respectueuse des Institutions de la République et putschiste, de nombreux observateurs avaient fortement critiqué et attaqué Alpha Condé pour ces propos jugés malheureux et maladroits comme lui seul en a le secret. En réalité, cette réponse souhaitant, incitant plutôt les militaires Guinéens à empêcher la succession constitutionnelle, à barrer la route du sommet de l’état à ses propres collaborateurs et proches et à prendre le pouvoir dès après sa mise en bière, résume la personnalité d’Alpha Condé : Tout le bonheur pour soi, l’enfer pour la Guinée et les Guinéens. Comme disait Louis XV « Après-moi, le déluge ».
Par rapport à cette sortie, beaucoup d’observateurs en Guinée et en Afrique, ont fait part de leur indignation et déception face à ces propos d’un ancien dirigeant estudiantin, un opposant de 50 ans, un panafricaniste, un combattant pour le triomphe de la Liberté, de la Démocratie et du Droit.
Mais, l’histoire et les faits l’ont désavoué. Sa prophétie en voulant s’appuyer sur la règle de 3 a totalement échoué. L’histoire retiendra et elle sera enseignée en Guinée et en Afrique que la formule du « Jamais 2 sans 3 » ne s’est pas appliquée à Alpha Condé après ses deux prédécesseurs dont il faisait allusion.
Le Président Ahmed Sekou Touré, (c’est le lieu de le rappeler et préciser que l’avènement au pouvoir n’est pas tombé du ciel mais résultait bien des élections ouvertes et transparentes largement gagnées par le PDG – RDA à l’époque, ce qui veut dire clairement que Alpha Condé n’est pas le premier Président démocratiquement élu en Guinée), est décédé le 26 mars 1984 à Cleveland aux États-unis d’Amérique. Après des obsèques dignes d’un Grand dirigeant du monde, le 30 mars, les militaires du CMRN ont pris le pouvoir le 03 avril 1984 empêchant ainsi la succession prévue par la Constitution de l’époque. La prise du pouvoir par le Colonel Lansana Conté a barré la route de la succession au Premier ministre, Dr Lansana Beavogui et mis fin au régime du Parti-Etat incarné par le PDG.
En 2008, le Capitaine Moussa Dadis Camara et son CNDD n’ont pas attendu les funérailles et ont immédiatement pris le pouvoir dans la nuit du 21 au 22 décembre 2008, dès après l’annonce du décès du Président Lansana Conté, souffrant depuis de longues années. Ainsi, le trio de tête du CNDD (Capitaine Moussa Dadis Camara – Colonel Sekouba Konaté (devenu Général) – Général Mamadouba Toto Camara décédé le 23 août dernier) a tué dans l’œuf les espérances du successeur constitutionnel, le Président de l’assemblée Nationale, feu Aboubacar Somparé et de son parti, le PUP de succéder au Président Lansana Conté.
Le 05 septembre 2021, le Lieutenant-Colonel, Mamadi Doumbouya, ses Forces Spéciales et le CNRD n’ont guère voulu attendre le décès du Président Alpha Condé, pour le surprendre désagréablement dans son lit en mettant brusquement fin à son pouvoir qu’il croyait DIVIN : » Quand ta main est dans la main de DIEU, dit-il, tu n’as rien à craindre « . Reste à savoir comment et jusqu’à quand le RPG pourrait continuer à supporter et à résister à ce choc inattendu. Ses lieutenants vont-ils restés toujours fidèles au Président Alpha Condé ?
Aujourd’hui nul besoin de continuer à accabler ou d’humilier davantage un Chef d’État qui l’a suffisamment été jusque dans sa dignité et son honneur. Une épreuve humainement émouvante. Après un Samedi de totale jouissance sinon de fête dans la plénitude de tous les avantages et honneurs liés au pouvoir avec des habitués et privilégiés du Palais, Alpha Condé, ne pouvait imaginer être réveillé par des coups de fusils et être dans les mains de ses tombeurs ce dimanche matin.
Les images d’un Alpha Condé fraîchement déchu et encerclé de militaires qui l’ont défié et démystifié, les scènes d’un Alpha Condé assis entre 2 soldats dans un véhicule non climatisé circulant à faible allure sur l’axe Bambeto – Hamdallaye au milieu d’enfants criant : » Alpha Condé, liberté, liberté, liberté » et d’autres qui ont fait plusieurs fois le tour du monde ont provoqué l’émotion, parfois de la compassion pour l’homme. Mais, elles devraient encore nous enseigner les uns les autres, rappeler aux Chefs d’état et Grands Hommes ou ceux qui prétendent l’être, et qui ont quelque fois la mémoire courte, que rien n’est définitivement acquis dans ce monde, que rien dans la vie n’est irréversible encore moins éternel. Que tout peut, en une fraction de seconde, basculer dans un sens ou un autre. Résister à la Déification, rester lucide et être utile à ses semblables sont, parmi tant d’autres, des vertus à cultiver contre la fanfaronnade, l’arrogance et la mystification, des vices dans lesquels, les thuriféraires s’emploient à enfermer les Chefs.
Ainsi pour revenir à l’ancien Président, il faut noter que le débat sur son bilan est plus que jamais ouvert. En attendant, la responsabilité de ce coup d’état à l’ancienne, comme ceux des années 60, 70, 80, qui voyaient des Hommes en kaki faire irruption dans les Palais présidentiels pour arrêter ou tuer le Président de la République et proclamer la prise du pouvoir par une jointe, qui n’honore pas la Guinée est imputable à Alpha et à sa Gouvernance. Du mitard où il est depuis ce fâcheux réveil du 05 septembre, Alpha Condé, sans doute, est fortement plongé dans la méditation. Dans les semaines et mois prochains, il risque d’être davantage meurtri par les retournements de vestes qui se manifestent déjà et des propos aux antipodes de ceux qui encensaient hier, l’ancien Maître du Palais SEKHOUTOUREYAH.
Sa chute devrait inspirer les futurs Présidents Guinéens à ne pas céder aux sirènes et flagornerie des opportunistes démagogues et admettre que la Guinée n’est pas une propriété privée où on peut se permettre tout. Les mêmes causes produisant les mêmes effets et conséquences, il est important que les erreurs et fautes commises par Alpha Condé et sous son règne ne se reproduisent plus afin que le coup d’état du 05 septembre 2021 soit le dernier et que la Transition qu’il instaure constitue le point de départ d’un nouveau cycle, celui où le pouvoir se prendra démocratiquement et s’exercera dans le strict respect des textes. Le jugement demeurera implacable. Après la chute d’Alpha Condé, le plus important reste désormais de se pencher sur la construction du bien être et d’un meilleur devenir pour le Guinéeen.
Pour y parvenir, le CNRD devrait réfléchir sur une méthode ou une formule d’un Gouvernement non conflictuel, non tendancieux, non marqué dans un camp ou un autre. Prendre le temps et trouver des femmes et hommes compétents, patriotes et politiquement non marqués. Qui se consacreront entièrement aux objectifs définis dans la déclaration de prise du pouvoir du CNRD et non à défendre des chapelles politiques.
Que les partis et mouvements politiques soient traités à la même enseigne d’égalité et que chacun se prépare et se consacre à l’exercice de conquête du pouvoir, le moment venu. En ce Vendredi Saint, VEUILLE ALLAH, NOTRE CRÉATEUR, accepter que les sangs versés soient les sacrifices du bonheur de la Guinée et des Guinéens. Amen.
Par Abdoulaye Condé