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La communauté internationale face à ses contradictions : entre valeurs et réalités

La communauté internationale aura vécu. Alors qu’elle avait réussi, tant bien que mal, à s’ériger en gendarme du monde, la voilà désormais qui peine à se faire entendre. Finie l’époque où elle incarnait un ultime recours et semblait un rempart sûr. Désormais incapable de transcender les contingences et de s’imposer, bon an mal an, sa déchéance plonge dans le désarroi les peuples opprimés, privés de son soutien et de son arbitrage.

Qui pour réanimer ce grand corps malade, rongé par les querelles géopolitiques, au moment même où il renie ses valeurs traditionnelles pour s’engager dans les jeux troubles du pouvoir et la poursuite d’intérêts sordides ?

Chaque État tient à sa souveraineté, acquise de haute lutte, et défend jalousement son indépendance. Une aspiration noble en apparence, mais devenue l’alibi idéal pour instaurer, par les armes et en toute impunité, des régimes totalitaires, sans que personne n’ose s’y opposer ou s’en indigner. Le droit d’ingérence, qui permettait jadis de tracer une ligne rouge face aux exactions, garantissant un minimum de décence démocratique, a disparu au profit d’un prétendu respect, du reste aveugle et suspect, d’une souveraineté feinte et opportuniste des pays.

En réalité, ce souverainisme de mauvais aloi, brandi à grand renfort de propagande, ouvre la porte à une répression sauvage contre des populations vulnérables. L’Occident, échaudé par les accusations d’impérialisme, a baissé la garde, capitulant devant le populisme et les appels à la « réappropriation » des États par des révolutionnaires douteux. Désormais, les chefs autoproclamés d’États africains, faux dévots de la décolonisation, peuvent disposer librement du destin de leurs pays avec des abus et des exactions inacceptables et anachroniques. Les condamnations, timides et sans suite, se limitent à des déclarations de principe sans lendemain. La boîte de Pandore est ouverte.

SOUVERAINETÉ OU IMPUNITÉ ? LE PIÈGE DES RÉGIMES AUTORITAIRES

La reconnaissance d’une souveraineté mécanique par l’Occident a été perçue comme un blanc-seing. Même lorsque l’indépendance ne saurait justifier l’impunité, les mises en garde manquent de fermeté. Les sanctions, autrefois redoutées, sont écartées sous prétexte de ne point en rajouter dans la souffrance de populations déjà martyrisées. Quand bien même elles sont appliquées, c’est de guerre lasse, et elles ne sont pas effectives ; dans le meilleur des cas, c’est avec parcimonie, laxisme, légèreté, complaisance et hésitation.

Le dialogue est privilégié et le consensus est vainement recherché. Un clair-obscur qui n’a pas résisté à la tempête des coups d’État, ayant réduit la communauté internationale à l’impuissance avant l’hibernation totale. Les putschistes ont sonné le glas des objecteurs de conscience et des défenseurs les plus acharnés du suffrage universel.

Résignée, la communauté internationale ne distingue plus le pouvoir des armes de celui des urnes : « du pareil au même », avec une légitimité équivalente. Les règles sont brouillées : coups de force ou élections, pourvu que le pouvoir soit tenu d’une main de fer. La loi du plus fort triomphe. « Si tu es faible, tais-toi : nul besoin du mandat de ton peuple pour devenir notre partenaire », voilà la philosophie d’un ordre mondial qui relègue démocratie et État de droit au rang de vœux pieux.

Le monde, jadis divisé en blocs idéologiques, est désormais scindé entre l’élan démocratique et la légitimation des coups de force. Les adeptes du totalitarisme sous le vernis révolutionnaire s’unissent, tandis que les défenseurs des libertés peinent à se faire entendre.

L’heure est venue pour les patriotes africains épris de liberté d’unir leurs forces au sein d’une ligue pour la démocratie et les droits de l’homme. Ils doivent contraindre la communauté internationale, complice de l’ordre établi, à défendre les peuples plutôt que des régimes illégitimes. Bannissons les honneurs réservés aux dirigeants sans mandat ! L’interdiction de voyager, ainsi que la participation à des rencontres et sommets internationaux, doit être activée et appliquée à la lettre. On ne devrait pas dérouler le tapis rouge devant des dirigeants qui n’ont pas le mandat de leurs peuples et qui sont réfractaires à la démocratie.

À force de compromis, les grandes nations ont permis l’enracinement des dictatures. Même les simulacres d’élections, sans cesse annoncés mais plus que jamais incertains, destinés à donner le change, ne sont plus à l’ordre du jour : des mandats auto-octroyés sont décidés et imposés au grand jour, dans un climat d’intimidation, de négation, de suppression de la pluralité politique et des droits constitutionnels.

Voilà le résultat du laxisme international : la caporalisation d’États par des militaires qui dictent leur loi, sous le regard passif de la gouvernance mondiale. Un affront à la démocratie, une faillite morale sans précédent.

Tibou Kamara

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