En relançant les poursuites contre sept militaires initialement blanchis par un non-lieu, la justice guinéenne s’attaque désormais à la face cachée de la tragédie. Ce revirement est l’onde de choc provoquée par les «vérités de Toumba Diakité».
Ses dénonciations, couplées à la libération de la parole de victimes autrefois murées dans le silence par peur de représailles, ont brisé le verrou de l’impunité dans un pays trop souvent marqué par les crimes de sang sans coupables. L’enjeu de cette seconde phase dépasse la simple condamnation d’exécutants. Il s’agit d’une immersion chirurgicale dans la chaîne de commandement.
Le cas du colonel Bienvenu Lamah est, à cet égard, le «pivot de l’accusation». Désigné par les parties civiles comme le gestionnaire du camp militaire d’où ont déferlé les escadrons vers le stade, son dossier est la clé de voûte des responsabilités hiérarchiques.

Pour la première fois, la justice guinéenne tente de démontrer que l’ordre de tuer n’était pas une dérive isolée, mais une mécanique orchestrée au sommet de l’appareil sécuritaire. Pour les parties civiles, cette relance est perçue comme une avancée historique sous le leadership du général Mamadi Doumbouya.
Certes, la récente grâce accordée au capitaine-patriote Moussa Dadis Camara a pu instiller un parfum de favoritisme chez certains observateurs. Cependant, pour les victimes, l’essentiel est ailleurs. La vérité judiciaire doit être gravée dans le marbre avant toute clémence politique.
Poursuivre ces sept hauts gradés, c’est envoyer un message selon lequel «personne n’est au-dessus du récit des faits. Ce qui veut dire que la lutte contre l’impunité ne se mesure pas seulement à la durée des peines, mais à la capacité de l’État à nommer chaque responsable».
Par Abdoulaye A. Diallo