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Grâce présidentielle à Dadis Camara : un calcul politique masqué sous une stratégie de communication, selon Abdoulaye Djibril Sow

Dans une émission diffusée le 9 avril 2025 sur la chaîne Voxafrica et animée par la journaliste Soukaina Skalli SALL, le journaliste franco-guinéen Abdoulaye Djibril Sow a livré une lecture critique du décret de grâce présidentielle accordée à l’ex-chef de la junte, le capitaine Moussa Dadis Camara, condamné à 20 ans de réclusion criminelle pour crimes contre l’humanité dans l’affaire du 28 septembre 2009.

Selon Abdoulaye Djibril Sow, cette décision signée le 28 mars 2025 par le président de la transition, le général Mamadi Doumbouya, ne relève ni d’un élan humanitaire ni d’un souci de réconciliation nationale. Il y voit plutôt un calcul politique à visées électoralistes, visant à tester la réaction de l’opinion publique en pleine période de transition et de préparation vers un retour à l’ordre constitutionnel.

Le journaliste insiste notamment sur la chronologie soigneusement orchestrée des décrets présidentiels. Le 26 mars 2025, un premier décret a été signé pour la prise en charge de l’indemnisation des victimes du 28 septembre par le budget national. Deux jours plus tard, le 28 mars, la grâce présidentielle à Dadis Camara est annoncée. « Cette séquence n’est pas innocente. Elle vise à amadouer l’opinion en feignant une reconnaissance des souffrances des victimes, pour mieux faire passer ensuite une décision qui heurte profondément les principes de justice », a-t-il analysé.

Pour Abdoulaye Djibril Sow, cette grâce constitue un revers judiciaire dans un procès emblématique, encore en cours depuis son ouverture en septembre 2022 après plus d’une décennie d’instruction. L’affaire reste pendante devant la cour d’appel. « Ce décret vient fragiliser l’autorité judiciaire. Il compromet les efforts engagés pour lutter contre l’impunité et jette le doute sur l’indépendance des institutions », a-t-il martelé.

Ce geste présidentiel, qui intervient dans un contexte politique tendu, soulève une vague d’indignation, aussi bien au sein des organisations de défense des droits humains que parmi les familles de victimes. Beaucoup y voient une remise en cause des engagements pris par les autorités de rendre justice dans un dossier qui symbolise la lutte contre les violences d’État.

En parallèle, Abdoulaye Djibril Sow salue cependant la célérité avec laquelle le président Doumbouya a imprimé un rythme soutenu dans la réalisation de certains projets, notamment en matière d’infrastructures routières. Il y voit un signe de détermination présidentielle, mais regrette que cette même volonté ne soit pas toujours au service des principes de justice et d’équité.

Alors que les réactions nationales et internationales se multiplient, une question demeure : la justice guinéenne pourra-t-elle encore suivre son cours, dans un climat où l’exécutif semble reprendre la main sur l’un des dossiers les plus sensibles de l’histoire récente du pays ?

Par Racine Dieng

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